Les Psaumes

Sceau des Eglises du Désert (1715)

Les Psaumes

Dans leur cachot, les pasteurs n'avaient de cesse de chanter des psaumes, ce qui était formellement interdit, et un gros sujet de préoccupation du gouverneur Saint-Mars qui s'en entretenait fréquemment avec les ministres de Louis XIV: "le premier de ces ministres protestants qu'on a conduits ici, chante nuit et jour à haute voix des psaumes, exprès pour se faire connaître tel qu'il est". Réponse du ministre: "le meilleur moyen de faire taire celui qui chante continuellement est de lui faire donner souvent la discipline", et encore: "lorsqu'il y aura quelqu'un des prisonniers confiés à votre garde qui ne feront pas ce que vous leur ordonnerez ou qui feront les mutins, vous n'avez qu'à les fouailler malhonnêtement et les punir comme vous le jugerez à propos... vous ne devez pas souffrir que ces ministres chantent des psaumes à haute voix; mais si leur désobéissance allait jusqu'à le faire quand vous le leur avez défendu, alors il faut les mettre dans les lieux les plus écartés, afin qu'ils ne puissent être entendus."
On a du mal à comprendre de nos jours une telle exaspération de la part des autorités à l'encontre d'un exercice somme toute fort innocent et orthodoxe. C'est que la piété huguenote s'est nourrie du chant de ces psaumes, paraphrasés par Clément Marot et Théodore de Bèze et harmonisés notamment par Claude Goudimel. Le psautier huguenot a eu un rôle militant et actif voire provocateur dans la propagation de la Réforme. Le protestant chantait de psaumes en tout temps et en tout lieu: chez lui dans sa maison (à table, à la veillée, lors du culte familial), au temple lors des assemblées mais aussi sur le chemin qui le menait au temple, comme aussi au cabaret, aux champs ou à l'atelier; il les chantait avant la bataille (cf. les Camisards), sur le bûcher, sur la potence ou sur la roue et tout naturellement en... prison. Les jeunes enfants les apprenaient par coeur en même temps que la lecture, avant même le catéchisme...
C'est donc une affirmation d'identité en même temps qu'un stimulant de la foi et un réconfort dans l'adversité car ils sont adaptés à toutes les circonstances de l'existence.

On entendait partout ainsi que le dit Clément Marot :
Le laboureur à sa charrue,
Le charretier parmi la rue
Et l'artisan en sa boutique,
Avec un psaume ou un cantique
En son labeur se soulager.